Portrait : De Croo, l’homme pressé devenu sage
Alexander De Croo devient donc Premier Ministre, c’est une belle consécration pour lui, et cela montre la position de plus en plus centrale de la famille libérale dans le monde politique belge. Les libéraux ont été au pouvoir depuis 1999, soit plus longtemps que n’importe quel autre parti. Il représentera la Belgique à l’échelle internationale, au Conseil Européen, qu’il connaît (il a assisté à quelques sommets, de par sa fonction de ministre des Finances) et sera donc notre porte-voix à travers le monde, ce qui n’est pas pour déplaire à De Croo, qui ne devrait pas avoir trop de mal à se faire comprendre de ses collègues du monde entier, car il est parfait trilingue.
La politique, par tradition, le commerce, par passion
Né en 1975 à Vilvorde, cet enfant du Brabant Flamand est le fils de Herman De Croo, personnage incontournable de la politique belge, qui fut tour à tour député, ministre (national, on ne disait pas encore fédéral), bourgmestre de Brakel, président de l’Open VLD, ministre d’Etat, président de la Chambre, et finalement député flamand. Mais c’est à une carrière dans les affaires qu’il se destine. Un Master en Ingénierie Commerciale à la VUB en 1998, avant une escapade américaine à Chicago (pour un MBA) puis à Boston (pour y travailler en entreprise de consulting), avant de revenir au pays en 2006, sous l’insistance de son père pour un parti, l’Open VLD, en quête de relève générationnelle après le départ des Golden Boys Karel De Gucht, Guy Verhofstadt ou Marc Verwilghen.
C’est en 2009, que De Croo est lancé en politique, et récolte 47 000 voix aux européennes sans se faire élire. Mais trois mois plus tard, après une débâcle aux régionales, l’Open VLD, éjecté du gouvernement flamand, se choisit un nouveau président, et De Croo crée la sensation en dominant Marino Keulen. Il devient président de parti. Il débranche rapidement la prise du gouvernement Leterme en 2010, au prétexte de BHV, en fait pour torpiller son rival, le CD&V. Battu à nouveau aux élections législatives, il quitte la présidence de son parti … mais est élu sénateur.
Il va cependant revenir dans le parcours en 2012, en profitant d’un énorme concours de circonstances : en octobre, Vincent Van Quickenborne, élu bourgmestre de Courtrai, quitte l’attelage fédéral. De Croo, qui végétait au Sénat, se retrouve propulsé au niveau fédéral. Il devient le chef de file gouvernemental des libéraux flamands et récupère le Ministère des Pensions. Entre 2014 et 2019 il occupera successivement le poste de la Coopération au développement, puis (depuis décembre 2018), des Finances. Toujours comme Vice-Premier.
Mais suite à la crise sanitaire et à la disgrâce de Maggie De Block, il redevient le porte-drapeau de son parti. Une trajectoire mouvementée pour un homme dynamique qui va donc ceindre le job rêvé par tout politique belge … alors qu’il ne voulait pas faire de politique à la base. Très surréaliste. Mais tellement belge, du coup…